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Comment apaiser les tensions familiales ?

Lorsque des tensions apparaissent, chacun opte - plus ou moins consciemment - pour une « stratégie » pour les gérer. Face à une même difficulté, nous pouvons en effet avoir des réponses très différentes selon notre personnalité, notre rapport au vécu qui créé les tensions, notre volonté de résoudre ce qui fait conflit et notre capacité à faire face. Ce qui est universellement nécessaire dans une telle situation est l’amorce d’un dialogue, d’un échange entre les protagonistes afin de comprendre ce qui fait conflit.


Néanmoins, rares sont les personnes qui possèdent les outils (« soft skills ») nécessaires pour mener un dialogue efficace, à commencer par l’écoute.

L’attitude la plus courante lorsque l’on est en conflit est de faire valoir son point de vue, et de chercher à avoir le dernier mot sur l’autre. Or, c’est précisément dans ce genre de situation qu’il faudrait se rappeler le vieil adage « La parole est d’argent et le silence est d’or».

Il est souvent mal compris. Le silence est d’or ne signifie pas qu’il vaut mieux se taire mais qu’il faut apprendre à écouter, et pour cela, il est nécessaire de se taire.

Citons le philosophe Grec Zenon d’Elée : "La nature nous a donné deux oreilles et seulement une langue afin de pouvoir écouter d'avantage et parler moins."


Que devons-nous comprendre de cette sagesse antique ?


Il est fréquent, lorsque l’on accompagne une famille dans des difficultés relationnelles, de se rendre compte que ses membres communiquent mal, et que derrière les tensions se cachent non-dits et secrets de famille. Autant de circonstances où l’absence de parole a fait le lit de conflits futurs.


La culture familiale du silence n’est donc pas favorable à une bonne entente et à des relations sereines. La priorité pour apaiser les tensions est donc de remettre la parole au cœur des liens familiaux. Ceci passe en premier lieu par l’écoute bienveillante et non-jugeante de chacun des membres de la famille.

Bien souvent, l’apaisement des tensions ne nécessite pas la résolution prioritaire des problèmes concrets qui se posent. Ce dont chacun a besoin avant tout, c’est être d’être écouté, plus encore que d’être entendu.

Ce n’est pas toujours facile car cela nécessite d’être capable d’écouter dans une seule et unique intention : celle d’être dans l’écoute.

Or, lorsque nous échangeons avec l’autre, nous y mettons la plupart du temps une intention, qui n’est en général pas simplement d’écouter mais de parvenir à nos fins. Le premier « travers » de l’écoute est donc que nous accordons notre oreille pour ensuite pouvoir mieux nous exprimer. Or, il faudrait avant tout écouter l’autre pour simplement lui permettre de verbaliser son ressenti, afin d’extérioriser ses émotions et identifier les besoins non-satisfaits derrière celles-ci. Sans autre intention.


Que faisons-nous la plupart du temps lorsque nous accordons notre écoute ?

D’après le schéma de E. H. Porter (développé en 1950), nos intentions sont de 5 ordres : notre réflexe lorsque nous écoutons l’autre est soit de chercher une solution ou une action en réponse à ce qui est dit, soit de l’évaluer, ou encore de juger, d’investiguer, ou enfin d’opter pour une attitude de soutien. Aucune de ces 5 attitudes ne représente une véritable écoute, dénuée d’intention. Soutenir l’autre dans son problème peut en effet parfois le conforter dans sa situation est n’est donc pas neutre. Lui formuler notre point de vue – jugeant ou non – ne l’est pas non plus.

La seule et unique intention qui permet une véritable écoute est en définitive celle-ci : comprendre.

Pour cela, l’accompagnant formé à la relation d’aide dispose de plusieurs outils lui permettant d’offrir à son interlocuteur un espace d’expression sécurisant, à l’intérieur duquel il pourra déposer ce qu’il porte (ressentiment, frustrations, agressivité, tristesse, etc). Cet espace, grâce à l’écoute active, sera également le lieu de la mise à distance par rapport au conflit. L’accompagnant agira comme un miroir tendu à l’autre, lui permettant de prendre du recul par rapport à ce qu’il vit et d’envisager la situation sous un autre angle que ce qu’il avait jusque-là perçu.

C’est ainsi que, progressivement, chaque membre de la famille pourra libérer sa parole, se sentir écouté, entendu, compris, et peu à peu pourra s’ouvrir à la possibilité d’un échange avec les autres.

Ce processus ne se fait bien sûr pas en un claquement de doigts et peut prendre plus ou moins de temps, selon la profondeur de différend et l’attitude d’ouverture dont chacun fait preuve.


Est-il possible de développer nos capacités d’écoute et de compréhension sans être nécessairement un expert en communication ?


L’attitude la plus utile afin de tendre vers cet objectif est celle qui consiste à se mettre à la place de l’autre. Mais lorsque l’on est en présence d’un conflit lié à une succession ou un héritage, est-il réellement possible de faire preuve de l’empathie nécessaire à une écoute de qualité ?

Selon un concept utilisé en PNL, chacun appréhende le monde d’après sa propre carte, qui n’est pas le territoire. Ce que ce concept signifie est que chacun a sa propre vision, sa « carte mentale » du monde, qui est unique à chacun individu et différente de celle de l’autre. Cette façon unique de nous représenter la réalité est source de conflit, car bien souvent, nous oublions de faire la différence entre notre carte et cette de l’autre, et nous pensons en outre que notre carte est LA bonne. Par conséquent celle de l’autre est forcément mauvaise.


Afin d’avancer vers une résolution des tensions dans le cadre par exemple d’un partage d’héritage faisant l’objet d’un désaccord, il est important de se rappeler ceci : ce que l’autre veut n’est ni bon ni mauvais mais simplement différent. En quelque sorte, tout le monde a raison de vouloir ce qu’il veut, ou plus exactement, chacun à SES raisons.

C’est ainsi que, grâce à l’écoute active et à l’acceptation de la carte de l’autre, il est possible de faire bouger les lignes et d’avancer vers une résolution. Même si celle-ci ne donnera pas entière satisfaction à toutes les demandes de chacun, l’objectif est de faire en sorte qu’elle réponde à ses besoins prioritaires, tout en préservant la relation.


Il apparait donc que la résolution d’un conflit en lien avec une succession ou un héritage ne consiste pas prioritairement à effectuer un partage des bien mais avant tout à permettre l’expression du ressenti et des émotions de chacun, et d’aider à leur compréhension mutuelle. C’est pourquoi bien souvent, une résolution judiciaire d’un conflit à propos d’une succession ne peut apporter la satisfaction attendue, car cette approche n’accorde aucune place à l’expression des émotions, sans laquelle il n’est pas possible de comprendre les besoins réels de chacun et de les satisfaire. C’est pourquoi il ne peut y avoir de partage des biens satisfaisant sans partage d’écoute préalable.



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